Table des matières

HUMUS

HUMUS de Luc Kerléo et Dominique Leroy
Exposition du 1 septembre au 9 septembre 2012
Plateforme intermédia / La Fabrique à Nantes
Vendredi 7 septembre : Présentation de la Carte blanche ECOS et dégustation de graines germées à 18h

Humus est une action artistique consistant à utiliser une salle de spectacle comme lieu de vie et atelier: penser, bricoler, détourner, cuisiner, dormir, imiter, inventer, manger, recycler, détourner
Humus fait référence à la matière biologique qui se constitue à la surface du sol par les résidus d'activités biologiques. Dans notre cas il s'agit de constituer un humus en habitant sur une durée donnée dans un lieu qui est tout le contraire d'une habitation.
1ere phase du 13 août au 31 août : accessible au public uniquement par des reports médiatiques créés, formés et déformés par les artistes (blog, stopmotion, divers tournages image et son etc…)
2e phase du 1er septembre au 9 septembre (horaires : 14h00>18h00) : visite par le public du campement dans la scénographie de la vie des participants dans le lieu.

Jeux

Quelques vidéos du projet

https://vimeo.com/48438128

https://vimeo.com/48236005

https://vimeo.com/48236004

Penseés

Quel lien est-ce que tu vois entre Humus et ton activité artistique? Comment le fait d'y participer est en lien avec ce que tu fais par ailleurs?

Dominique Leroy Humus, la carte blanche à Ecos sur la plateforme intermedia se déroule sur 3 semaines en été, pourquoi pas habiter les lieux, sous la forme d'un camping en référence aux premières actions organisées par Ecos en 2007 (camping et rencontres d'éco-création)?

Oui, mais la fabrique, dans le quartier de la création, sur l'île de Nantes n'est pas un lieu de vie, habiter sur les lieux même sur une courte durée, c'est l'aventure (bruit des alarmes, des ventillations, pas de toilettes etc…). Échanger avec Luc est une façon pour moi d'activer un nouveau processus de création qui relie les différentes facettes de mes activités (le jardinage, la conception de mobilier et d'objets plus ou moins utilitaires, la création d'un envirronnement sonore etc…). Réagir, co-aménager le lieu, répondre aux besoins du quotidien, le fait d'habiter sur un lieu d'exposition annule aussi les distinctions entre “pratiques artistiques” et “pratiques du quotidien”. Les questions économiques (Etymologie : du grec “oikos”, maison et “nomos”, gérer, administrer) rejoignent ici les questions artistiques. C'est je pense ce qui fait lien avec mes activité et mon quotidien : Au sein d'Ecos je suis impliqué depuis plusieurs années sur des questions et des projets liés à l'espace public, aux processus urbains, l'association accompagne par exemple la création de jardins urbains en pied d'immeuble, imagine des jardins hors-sol pour zones stériles (ex : balcons, parking…), nous menons des recherches et des créations autour de la cuisine, des circuits courts, de l'autonomie, de l'autoproduction, nous proposons des résidences d'artistes donc pas mal de projets “interdisciplinaires” qui mêlent art, paysage, pratiques de voisinage, phénomênes urbains… Certains projets d'Ecos s'échelonnent sur plusieurs années de façon à investir le temps du développement urbain (ex : atelier d'urbanisme avec des groupes d'habitants). Au sein d'Ecos et aussi dans mes activités artistiques plus personnelles, je travaille sur le lien entre l'art contemporain et l'environnement. Cette réflexion s'appuie sur une tradition qui remonte aux années 1960 : la «sculpture sociale» de Joseph Beuys, les « happenings » d' Alan Kaprow, les artistes du land art aux états-unis,le mouvement fluxus en Europe. De nombreuses pratiques artistiques se construisent sur cet héritage et relient encore aujourd'hui art éphémère, création et pratiques collaboratives. Humus, même développé a petite échelle et en intérieur (une salle de 200m2), c'est l'occasion d'être confronté à une situation qui fait echos à ces ces différents processus de création.

Luc Kerléo Je vois plusieurs aspects. D'une part depuis quelques temps je ressentais le besoin de prendre un peu de distance avec mon mode de travail habituel, de sortir de mes habitudes. Je voulais me trouver à nouveau dans la situation dans laquelle j'étais lors de ce que je pourrais appeler la préhistoire de mon activité artistique, lorsque je bricolais des choses qui ne ressemblaient encore à rien mais qui étaient en fait les bases de ce qui est devenu ce qui occupe la majeure partie de mon temps actuellement. Dans Humus j'aime particulièrement un parti que nous avons pris qui est celui de faire sans travailler. Depuis quelques années une idée est apparue dans ma pensée: celle de capteur. Je réfléchissais à comment fonctionne un capteur. Et comme j'aime l'idée de me transformer moi-même j'essayais de voir comment je pourrais devenir un capteur. En un certain nombre d'années j'ai eu l'occasion de travailler avec différents types de capteur. Un capteur c'est un organe technologique qui à la base est en état stable, en état de repos, et dont la stabilité est perturbée par un phénomène. Contrairement à des circuits de puissance tels que des amplificateurs c'est un courant à très faible puissance, quelques millivolts, quelques milliampères, qui les parcourt. Les microphones, par exemple, fonctionnent comme ça. Ce qui stimule mon imagination c'est ce fait que les capteurs soient des choses en état de repos fonctionnant à très basse énergie. Ainsi, me mettre en état de capteur c'est me mettre en état de repos, faire descendre ma pression. J'ai travaillé avec des capteurs étonnants qui récoltent les perturbations électromagnétiques dans l'atmosphère. J'en ai fabriqué moi-même avec des moyens assez simples. C'est étonnant ce que peut récolter une chose à l'état de repos. Dans le repos il y a la veille, être en veille, sans plsus. Je voulais acquérir moi-même cette puissante sensibilité aux choses, à des signaux de la pensée et de l'imagination qui sont infimes et qui ont tendance à passer inaperçus. Je pense que c'est comme ça que j'ai commencé à penser à me créer des états d'ouverture, pour devenir capteur. Une chose que j'aprécie dans l'orientation que prend humus, c'est que nous arrivons à faire des choses de façon directe. J'aime beaucoup ça dans l'art: c'est un domaine dans lequel il s'agit de faire, au moins autant que de travailler. J'aimerais que le public se retrouve dans l'exposition de Humus comme face à des faits, des faits qui produisent un fait, un fait fait de multiples faits. Un fait c'est une différence comme, par exemple, rouler sur de la plaine et arriver au pied d'une montagne, ou inversement. Si on vient de la plaine le fait c'est la montagne et si on vient de la montagne le fait c'est la plaine. Quand j'arrive dans un lieu pour y faire quelque chose je me demande à quoi les gens s'attendent dans ce lieu. Puis je cherche comment je peux produire une différence avec cela. Finalement j'aimerais que mes interventions dans des lieux se limitent à ça: un décalage, un soubresaut, un hoquet, une boucle avec une rupture à un endroit, une rupture qui ne casse pas la boucle mais que celui qui la parcourt ressent comme un soubresaut. En fait c'est une certaine idée que j'ai de la sculpture qui apparaît là. On pense souvent à une sculpture comme un volume dans un espace. Mais on peut aussi se dire qu'il n'y a pas d'espace, au sens de pas de place, qu'il n'y a que des volumes dans des volumes, que tout est du plein dans du plein. Pour moi toute solution est potentiellement artistique. Dans mon quotidien je suis dans un potentiel artistique. Et il y a des volumes, certains réels et d'autres imaginaires, mais le quotidien est loin d'être vide. La vie c'est du plein. Le vide dans la vie ça n'est qu'une vue de l'esprit. Ce n'est pas comme dans une salle d'expo. Quand je suis chez moi je vis et je travaille dans une situation de confort. L'eau propre arrive toute seule au robinet et l'eau usée disparaît dans l'évier, dans la bonde de la douche. Mes excréments disparaissent dans un trou magique. Mes ordures sont prises en charge par des gens. Je me demandais comment je pourrais ressentir le fait que tout cela s'arrête de fonctionner, que des circuits aux quels je suis tellement habitué s'arrêtent de circuiter. Ca serait un changement, une rupture. Et, pour revenir à ce que je disais un peu avant, ça produirait des formes, ou du moins des sensations de formes, puisque ça serait une déformation du quotidien. Et pour moi le projet Humus est rapidement apparu comme une occasion de déformation du quotidien. Depuis qu'on a commencé à passer l'essentiel de notre temps dans cette salle je repense beaucoup à un artiste qui n'était plus dans mon esprit ces temps-ci: c'est Daniel Spoerri. Je pense notamment à ses “tableaux-pièges” parce qu'il y a des liens assez nets avec une partie de ce que nous faisons. Il fixait en l'état des repas qu'il prenait et les présentait à la verticale. Il collait tout ce qui se trouvait sur le plateau de la table et accrochait le plateau de la table au mur, comme un tableau. Et en allant faire des recherches sur internet concernant Spoerri j'ai découvert que plus tard dans son parcours il avait beaucoup travaillé sur l'organisation de repas en tant qu'acte artistique en soi. Ca fait le lien avec le fait que nous on soit visibles via une webcam lorsque l'on mage, mais également avec tout ce qui s'organise autour du repas et est connecté avec l'activité de se nourrir. En terme d'utilisation de l'espace du lieu je repense à ces pièces de Jason Rhoades où on affaire à un assemblage envahissant de plein de trucs que l'on peut se procurer dans diverses sphères du monde de la consommation. Je m'intéresse à l'idée d'assemblage car il n'y a pas de fabrication. Les différentes choses qui constituent un assemblage restent autonomes, visibles individuellement tout en étant intégrées dans un ensemble. En discutant avec Dominique il y a aussi une performance de Joseph Beuys qui est revenue à plusieurs reprises et qui revient de temps en temps dans mon esprit: I like America and America Likes me. Le principe en est assez simple: Beuys se fait acheminer de chez lui en Allemegne jusqu’à une galerie à New York sans poser les pieds sur le sol. On l’emmène jusque dans une salle grillagée dans laquelle on a amené un coyote. Il cohabite avec l’animal pendant trois jours, je crois. J’ai vu quelques extraits video de cette performance et c’est une action vis-à-vis de laquelle j’ai une affinité particulière. Le coyote est un animal qui n’est pas domestiqué et il se retrouve dans un environnement hyper urbain.

Qu'est-ce que tu cherches à construire? Qu'est-ce que tu souhaites présenter aux visiteurs?

Dominique Leroy Je n'avais pas vraiment d'idée précise avant de commencer Humus, ni pendant l'installation, juste cette idée d'expérience de vie dans les lieux ou nous pourrions inviter d'autres personnes à nous visiter (soit physiquement, soit par l'intermédiaire d'un stream vidéo diffusé sur le net), à participer, pourquoi pas contribuer. L'expérience de vie en binôme dans l'espace a très vite été riche en propositions, l'espace est vite devenu exigu. Au boût de quelques jours l'espace était rempli d'installations et nous étions pas mal occupé à repondre à nos besoins primaires : cuisiner dans l'espace, manger, se laver, dormir, bricoler des instruments de musique, recycler nos déchets… Quelques personnes sont passées, Didier par exemple nous a ramener plusieurs familles de lombrics pour notre composteur de déchets organiques. Pour compléter ce composteur, j'ai bricolé des bacs pour faire germer des graines. Cela a pas mal fonctionné, sans trop savoir comment faire j'ai remarqué que les graines poussaient mieux en paquets, sans doute une histoire d'équilibre dans le taux d'humidité, les graines germent mieux si elles sont regroupées, elles sêchent moins vite. C'est un peu comme la création en binôme, avec Luc, cela a pas mal fonctionné, rebondir sur les questionnements, les propositions de l'autre, proposer des solutions. Avec les lentilles germées, Luc a découvert une bonne recette : lentilles germées, huile d'olive + biscottes. Ce qui me plait dans Humus, c'est l'idée de contraste : Transformer un lieu de passage en lieu de vie, transfomer les restes d'une dizaine de jours de bricolage en sculptures, présenter des choses pas très présentables (comme des outils, des déchets…). Plus que la production d'objets, donner à voir de beaux objets, ce que je souhaite à l'issue du séjour, c'est partager avec les visiteurs quelque chose en devenir, l'idée de processus, une aventure urbaine. Les films d'animation (réalisés avec un logiciel stopmotion) tout au long du séjour retrace cette expérience. Au début, nous nous sommes concentré sur l'aménagement de l'espace de façon à accueillir ce processus de création. Nous avons placé la zone de culture proche de la grande baie vitrée, à proximité des graines en germination notre cuisine et un espace pour prendre nos repas, puis des lits perchés en hauteur sur les murs comme des alpinistes qui installent leurs bivouacs dans la roche. Nous nous sommes greffés sur le lieu, en aménageant les choses autour de nous de façon plus ou moins ergonomique. L'installation partagée avec le public, c'est simplement le lieu évacué. Pour matérialiser l'arrêt de notre séjour Luc a trouvé la bonne idée d'entourer notre zone de vie avec un filet de balisage, du coup toutes nos expérimentations, les restes du séjour, les films, les créations sonores sont circonscrites dans un périmetre reconnaissable. Avec ce filet qui entoure notre zone de vie, nous guidons le regard, l'idée d'Humus de départ, de temps sédimentés deviennent accéssibles pour le public.

Luc Kerléo Là encore il y a une histoire d'une rupture dans un fonctionnement, d'une forme produite par une rupture. Je cherchais ce qui pourrait produire une rupture ici, dans cette salle de spectacle. J'étais à la recherche de quelque chose à quoi on ne penserait pas dans cette salle-ci. D'habitude c'est une salle qui est utilisée pour des installations, des environnements, des spectacles, des actions, beaucoup tournés autour du multimédia, des conférences aussi. Les murs sont noirs de façon à ce qu'on puisse complètement se faire des éclairages sur mesure avec des projectuers et des contrôleurs électroniques. Quand Dominique m'a parlé de cette carte blanche dans ce lieu il m'a présenté son idée de camping. En fait ça rejoignait le rapport entre ce que je connaissais de cette salle et de ce que j'aurais aimé y faire. Dans la salle maintenant il y a des traces de la vie de personnes: coin cuisine, lits, douche, toilettes. Et ces traces sont enchevêtrées avec des choses plus inhabituelles, peut-être pas les objets en eux-mêmes mais la façon dont isl sont disposés dans l'espace, certains assemblages aussi. Il y a des relations entre objets qui paraissent sans doute énigmatiques. On peut sans doute se demander ce qui s'est passé, ou plutôt, pourquoi ceci, et cela, et cela ici. Déclencher des jeux de reconstitution c'est quelque chose qui m'intéresse et que je cherche souvent à produire pour les visiteurs dans mes travaux, parce que cela fait appel à des hypothèses et qu'un allié de choix des hypothèses c'est l'imagination.

Parles-nous de certaines choses que vous avez faites, fabriquées, de certaines réalisations dans Humus qui t'intéressent plus particulièrement.

Dominique Leroy Mesurer, scier, fixer, boulonner, découper, discuter, filmer, semer, découper, cuisiner, assembler, remplir, vider, arroser, attacher, faire tenir, dérouler, agrafer, porter, dérouler, allumer, ouvrir, fermer, serrer, déplier, boire, frire, égoutter, écrire, discuter, récupérer, déguster, scotcher, tendre, dormir, trier, cultiver, recycler, enrouler,étaller, amplifier, écouter, projeter… C'est un peu fou tous les gestes que l'on peut faire en quelques jours ! Ce sont les échanges avec Luc et la dynamique d'ensemble plutôt que des réalisations en particulier qui m'intéresse le plus, des petits détails techniques et les choix dans les aménagements et les installations réalisées par assemblage d'idées. Un jeu de questions/réponses qui forme une architecture sauvage basée sur le processus d'accumulation et d'assemblage. Je discutais avec Luc d'un livre sur les favelas en amérique du sud, les habitants récoltent des matériaux qu'ils stoquent sur les toits, dès que les matériaux sont réunis (ex : tôles, bois), ils peuvent construire des extensions à leurs habitations. C'est un peu ce processus qui est mis en oeuvre dans Humus, des matériaux apportés et recyclés sur place, des besoins identifiés et des réponses qui fonctionnent plus ou moins. Nous avons par exemple pas mal cogité à des façons de nous débarasser des eaux usées, Luc a proposé de faire évaporer l'eau dans des bacs, j'ai fabriqué une sorte de séchoir sur plusieurs étages. Jean-Baptiste (architecte de passage dans les lieux) nous a conseillé de nous rapprocher des aérations pour limiter les problêmes d'odeurs, du coup j'ai fabriqué une sorte d'extension (une chaussette en plastique) connécté à la VMC au plafond pour aspirer les odeurs. Je remarque que nous avons besoin de créer des extensions de manière a créer des ouvertures vers l'extérieur : se connécter à l'aération du bâtiment pour mieux renouveler l'air, poser des capteurs sur la vitre pour capter le flux des voitures, ouvrir un stream et tisser un lien avec des personnes extérieures. J'ai aussi réalisé quelques films des graines en germination s'orientant vers la lumière, grâce aux images prises toutes les 60 seconces puis visionnées en accéléré on peut voir le mouvement des tiges, une sorte de chorégraphie de la lumière.

Luc Kerléo Les petits films en stop-motion, des films qui sont faits à base de photos prises environ toutes les dix secondes et mises bout-à-bout. Ca fait des petites séquences vidéo dans lesquelles des mouvements très lents dans le temps deviennent visibles en une minute. C'est Dominique qui a amené cet outil et qui s'occupe de sa mise en oeuvre. Ca donne un recul sur les choses. Des choses qu'on ne voit pas comme mouvements le deviennent. Par exemple l'aménagement et l'évolution des objets dans l'espace sur plusieurs jours deviennent visibles comme mouvements. Un truc bizarre aussi: j'ai réalisé une espèce de machine à laquelle je ne m'attendais pas du tout au début. C'est ce système de distillation qui traite les eaux usées. Je l'ai fabriqué avec une cocotte-minute et des tuyaux d'arrosage. J'ai passé pas mal de temps à la regarder fonctionner. C'est un circuit dans lequel c'est de l'eau à l'état liquide qui passe à l'état gazeux et inversement qui transite lentement. Je pense que ça m'aide à méditer à une des questions qui revient régulièrement dans mon esprit et qui est que tout est tout le temps en mouvement, que rien n'est fixe, que les objets eux-mêmes ne sont fixes que par une vue de l'esprit, que même ces mots que j'utilise sont en mouvement. Et que, malgré que tout se fasse et se défasse tout le temps et bouge de partout il soit possible de construire une pensée, et qu'elle puisse s'exprimer même avec des mots qui bougent, mutent, avec des objets qui en deviennent d'autres ou de l'informe. Et puis il me faudra un peu de temps pour comprendre ce qui a fait impression sur mon esprit. D'autres choses sont sans doute en train de me marquer. Je leur laisse le temps de m'apparaître.

Comment s'est passé le travail dans le lieu?

On a commencé par faire une sorte de relevé en deux parties: une pour certaines choses qui nous marquaient particulièrement concernant ce lieu et une autre pour ce qui nous, intéressait, pour ce que nous avions envie de faire, ce dont nous souhaitions profiter. On a essayé de s'imaginer dans cette salle , de se représenter mentalement ce que cela pourrait être d'y vivre durant plusieurs jours. Il s'agissait d'une part de ne pas se faire surprendre par un problème qui aurait rendu l'expérience impossible et d'autre part de tirer au maximum parti d'un séjour qui en fait est relativement court. Une chose assez importante est que la salle n'a aucun réseau d'eau, ni en entrée, ni en évacuation. Dans le même ordre d'idée, c'est une salle confinée. Notamment il n'y a pas de fenêtres que l'on pourrait ouvrir. Ce genre d'aspect pose des défis pour un séjour de longue durée. On s'est rendus compte que l'idée d'utiliser cette salle comme habitation nous conduisait à passer pas mal de temps à s'occuper de choses qui dans un appartement n'en prennent qu'assez peu: ici, pas de robinet, donc jerricans à aller remplir au bar en bas. Pas de ramassage des ordures, ce qui nous a amenés à faire appel à un jardinier qui connaît les lombrics et sait les mettre à contribution pour l'élimination des déchets. On a donc installé un bac où des bestioles travaillent pour nous. Dans un appartement l'eau de vaisselle disparaît par l'évier. Ici il a fallu inventer des trucs mais on a fini par trouver des solutions amusantes à quelques problèmes embêtants de ce genre. L'idée du mobilier suspendu nous est venue dès la première étape de l'occupation effective des lieux. On avait plutôt prévu de travailler en délimitant des espaces cubiques. Mais au moment où on a commencé à poser des tasseaux de bois pour fabriquer ces cubes on s'est rendus compte qu'on en trouvait plus ça vraiment intéressant et que cela nous faisait perdre le côté ludique qu'on avait à la fois avec l'espace lui-même et le déroulement des idées qui nous venaient. On a regardé les perches qu'on avait posées à la verticale et on a décidé de tout monter de la même manière au hasard, qu'une fois les perches montées et fixées aux tubes métalliques au plafond on aurait bien des idées qui nous viendraient pour la suite. On trouvait amusant d'avoir des supports suspendus plutôt que des choses posées au sol. Alors on a pensé aux lits des alpinistes, ceux qu'ils suspendent à des parois à pic pour dormir en expédition. On a aussi décidé de régler la question de plateaux en les fixant à diverses hauteurs un peu au hasard, qu'on leur trouverait toujours un usage par la suite. On a également pensé à ce qui rendrait l'espace intéressant à vivre. On a fait des images, de la vidéo en stop-motion notamment, on a placé des micros de contacts à quelques endroits marrants et on a ramené ça sur la sono de la salle. On a diffusé divers sons de synthèses et divers enregistrements pour changer l'impression visuelle du lieu. Mais je crois que finalement on s'est mis spontanément à vivre dans ce lieu comme on vivrait dans un atelier. On a passé l'essentiel de notre temps à construire des trucs, du mobilier bizarre, à monter des écrans pour des projections vidéo, à bricoler diverses idées. Je pense que de diverses manières et en diverses occasions on a veillé à se rendre les choses les plus directes possible, à être au maximum dans la création, le jeu, et à contourner les choses fastidieuses. C'est comme ça qu'on a eu cette idée de mobilier en suspension avec ces longues perches accrochées au plafond métallique et ces plateaux triangulaires montés à diverses hauteurs assez peu définissables. Quand cette idée nous est apparue on était en train d'essayer de dresser un plan d'ensemble de la salle et on se rendait compte que c'était très difficile de trouver quelque chose qui soit utilisable pendant une vingtaine de jours où tout risquait d'être chamboulé tout le temps. C'est une idée qui a fait qu'on a pu poser une base très rapidement, sans être regardant sur des questions de géométrie, de mesures, de planification. Un autre exemple: à un moment on voulait faire des photos de la salle et de tout ce qu'on y avait mis mais il y avait pas mal de débris et poussières qui traînaient. Alors au lieu de passer la serpillère pour faire un sol propre on s'est dit qu'on pouvait faire quelque chose d'un sol sale. On a fait des tours en vélo en rajoutant en plus des flaques d'eau pour que les pneus marquent bien le sol. Ca faisait un grand dessin au sol, de la grandeur de la salle. Plutôt que de corriger ce qui ne nous allait pas on essayait de l'intégrer comme un jeu.

Ressources

Architecture & Rencontres DIY

http://www.bellastock.com
http://apadoloup.wordpress.com/

Art

Daniel Spoerri
Une page du Mamco sur Spoerri
Une page qui montre son lien artistique au repas
Une page du Mamco sur Spoerri
une page qui montre son lien artistique au repas
deux vues du déterrement de son dernier tableau-piège
Spoerri, résumé et quelques visuels
Jason Rhoades

Débrouillardise

banik est un site web traitant de la navigation au long cours: http://www.banik.org/pratique/infopratic.htm. On y trouve notamment des trucs et astuces éprouvés pour la vie et la survie en espace confiné. Ce qui vaut pour la cabine d'un bateau vaut parfois pour une salle de spectacle dans laquelle on passe plus d'une journée.

http://dcroissance.blog4ever.com/blog/index-443006.html

Partenariats

Humus est réalisé avec le soutien d'Ecos et Apo33 (Nantes).

Depuis 2005, Ecos développe un travail de recherche et d'expérimentation transdisciplinaire croisant art, médias variables, écologie et créativité urbaine.
www.ecosnantes.org

APO33 est un laboratoire artistique, technologique et théorique transdisciplinaire qui développe des projets collectifs divers alliant recherche, expérimentation et intervention dans l’espace social.
www.apo33.org