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IGNORANCE

(n+1) Portraits sur le motif

On pourrait dessiner des histoires partagées, documenter des présences fictionnelles, faire des croquis d'artistes au travail. Ce serait comme des portraits sur le motif, stop motion de projets artistiques en cours, insaisissables ; des zones de travail en arborescence, infiltrant le réel comme par contagion.

ALOTOF, ça commence à faire beaucoup d'artistes, réseau de projets eux-mêmes conçus de formats rhizomatiques, identités plurielles et hors frontières. ECOS, embarqué dans ce laboratoire pluriel, engage divers projets de recherche aux champs d'exploration si ouverts qu'on ne peut pas en saisir d’unité mais des dimensions, et des directions mouvantes, des lignes qui débordent ; des multiplicités de projets qui évoluent en traversant ce laboratoire pluriel. On y fabrique ses propres objets de travail, par infiltration aux contextes investis, où la transmission se mêle à la diffusion, où les temps de partage sont des temps de création. Le déjeuner sur l'herbe -processus socio-actif qui associe les habitants d'un quartier à la fabrication d'unités mobiles multifonctionnelles de pique-nique, de jardinage, d'ateliers de cuisine pour des temps conviviaux comme des balades-cueillettes dans la ville) - lors de ses diverses occurrences durant deux années, a pu activer des outils ou des notices de réappropriation avec le pari de “faire participer” des usagers déjà devenus co-constructeurs des utopies ainsi esquissées. Les espaces de rencontres artistiques proposés sont à ce titre déroutants : s'y fabrique un atelier éphémère d'activités spécialisées (ou artistiques !), où s'échangent des outils, où se partage et s'invente du commun - souvent technologique ; ces temps de laboratoire comme des expérimentations assumées, déjà actives, embarquent partenaires, artistes, participants. Et qu'est-ce qui s'y traverse? Autant de projets en genèse, kaléidoscopies d'un réel troué de promesses, sorte d'inversion du concept élargi de l'art, ou l'un de ses héritages… Le projet Entomosolar présenté lors de Posedy -cabanes de chasses réinvesties par des propositions artistiques lors de l'été 2014 en République Tchèque, a pu troubler en entretenant le doute d'une diffusion de sons synthétiques de sauterelles redoublant celui des véritables sauterelles actives dans l'environnement. Cette sorte de dédoublement questionne la posture artistique et son degré de réappropriation, d'esthétisation par retournement, où l'utopie de l'art ne fait qu'emprunter… Bee monitoring project, à ce titre calque l'écosystème de la vie des abeilles pour de véritables projets de sculptures vivantes où captation et transmission s'interconnectent, les données scientifiques se poétisent.

Des artistes générateurs, des invités, des protocoles par dérive, on aperçoit les effets politiques d'une telle praxis artistique qui implique les dimensions sociales et politiques des contextes investis. Les trames des projets hors frontières, le contexte comme terrain d'activité artistique, engagent le réel dans le champ de l'art jusqu'à s'y méprendre. Des expéditions en mer qui préparent un débarquement sur l'île fantasmée du projet Island, les traversées cartographiques de Default suivant les longitudes aléatoires, la course du soleil reprise dans une faille rocheuse comme un Refrain, la construction du vélo-mobile Velosynth jusqu'au prototypage partagé avec une communauté d'inventeurs et de bricoleurs attnetifs au renouveau des modes de transports ; ou celle un atelier nomade (n)A conçu selon les potentiels du contexte, et de nombreux dispositifs collaboratifs encore, impliquent de façon active artistes et participants sur la scène du monde ; autant de processus qui explosent les frontières et enchevêtrent les lignes de création propres à de tels openfields. ECOS comme divers partenaires d'ALOTOF appuient ses recherches artistiques sur les questions d'autonomie, d'écologie, d'échanges, de partage et de réappropriation (DIY), notamment par des temps de workshops à Valldora, Hranice, Bruxelles où le réseau d'artistes croise divers modes de réappropriation (peer to peer, greenfablab). Les actions artistiques comme celles des embarcations du projet Island créent des équipes de recherches où les rencontres créent la méthode. Comme la paysagiste Cécile Mercat, avec unidesuni qui souligne des usages potentiels d'espaces urbains désinvestis, et transforme par là même une vision de l'espace public par sa simple traversée, les artistes pratiquent des formes de prospectives par l'implication des participants aux divers projets.

Les recherches des artistes d'ALOTOF sont aussi techniques et technologiques, elles partagent cette sorte de pensée sauvage, hybridation de bricoleurs et d'ingénieurs. Les ateliers de production ressemblent à des performances au grand air où se remet en jeu le rapport des artistes à l'autonomie - par des méthodes composites - sans s'abstraire des questions économiques et écologiques. C'est bien une résolution esthétique à ces questions prégnantes que les artistes des réseaux ALOTOF assument et développent, héritiers des mouvements artistiques érigeant la vie au rang de l'art. Plusieurs projets captent des variables environnementales, données réinvesties par diverses ingénieries pour rejouer le réel, le redoubler. Une poétique nait ainsi de tels processus de travail qui étirent le temps de création, les projets tiennent de l'aventure ou de la vie des artistes et débordent de leur temps de production et de monstration ; ils auto-génèrent ou deviennent des relais, des passeurs… Par contagion, le réel s'innerve de traversées esthétiques projectives, on peut y voir s'inventer une sorte de démocratie contributive. Loin d'un laboratoire reclus dans un coin du monde, ALOTOF et ses émergences proposent une plateforme de production collective collaborative, une expérience ouverte qui ne cesse de rappeler : “il n'y a pas de monde commun, il faut le composer”.

digression, d'après modèle

Tout système est générateur de discours, bon gré, mal gré. Quel discours produire à partir d'un système - ou agencement qui se donne comme tel - non clos, poreux, ouvert ? Se tenir à l'écart : voici une règle. La contrainte de l'écart est ici croisée à la nécessité d'une entrée par objets, incapables d'assumer à eux-seuls une description du projet, pourtant tous emprunts d'une validité hors de la présente configuration : jeter de l'huile sur le feu, remuer le couteau dans la plaie, enfoncer le clous…et examiner le jus qui en sort.

Une oie, des coups de dés, le hasard du nombre décide du où et du quoi. Cartographie ou plateau de jeu ? Qui joue ? Le maitre du jeu a-t-il revêtu les habits de l'artiste ? La règle existe, quelque part dans les échanges qui circulent entre les joueurs, appelons-les les usagers, les co-: co-concepteurs, co-artistes, co-habitants, co-équipiers. Tous unis ou chacun pour soi ?

Un circuit imprimé, avec ses transistors, ses condensateurs, ses résistances, sa diode, son microprocesseur. Le signal circule, et s'effectue différemment à chaque station. Il emprunte le réseaux, se frotte à sa permanence, et prend diverses apparences ; pour autant, faut-il apparenter le signal au réseaux ? De quoi le signal est-il le signe ?

Un calendrier. Le mois Potentia ;le mois Island ; le mois Déjeuner sur l'herbe ; le mois Ecosphère ; le mois Caravan-Lab ; le mois Uni-Dé Uni. Ou plutôt des saisons, aux rythmes propres, aux transitions plus ou moins longues en fonction du chemin à parcourir, seul ou à plusieurs. Du temps s'écoule, on en a conscience, on l'oublie, il agit, on l'agit, de toute façon il mène la partie. Alors on joue avec, on le dé-route, le forçant à suivre une pente déviée, un vallon creusé pour lui, on le fait sortir de son lit.

Un organigramme, avec fonctions qui incombent aux uns et autres. Système aux hiérarchies caduques, où faire, dé-faire, re-faire est un gage d'efficacité. Le management à jamais condamné à la tentative désordonnée de l'essai, soumis aux lois de la reconfiguration permanente. L'intelligence à fait son nid dans cette structure-là, elle se déploie à son aise dans les bonds et rebonds des projets sitôt partagés sitôt modifiés, clones réciproques.

Un agrégateur de flux. La syndication de contenus comme colonne d'air. Se nourrir des courants que génèrent les systèmes, les digérer, les dissoudre dans l'activité propre. Les données transitent, passent par ici, repassent par là, laissent des traces, de celles que l'on peine à interpréter si on ne les pratique pas. La fluctuation des données est soumise au courant des espaces traversés. Le contrôle des flux échappe à l'agrégateur, il ne répond pas des actions produites au travers des bouquets de data qu'il élabore. C'est là tout son mérite.

Un archipel, vu d'oiseau. Les courants faibles représentés sous la forme de traits minces ne sont présents qu'à titre indicatif, ils fluctuent. On interpénétrait à tort cette vue en en faisant une lecture spatiale ; c'est plutôt de temps qu'il s'agit, avec de nombreuses variables. L'échelle du temps est celle du faire : la navigation d'une île à l'autre nécessite embarcation spécifique et à usage unique à construire au gré des besoins.

Les intestins d'un organisme sacrifié pour lecture par oracle. L'autopsie divinatoire produit un savoir par interprétation de données condensées dans les points de convergence. Le degré de condensation renseigne sur la quantité d’énergie en circulation au moment de l'offrande. Savoir constitué au présent du déchiffrage, le réseau de signe se réalise en fonctions des interactions en présence ; la passivité débouche sur l'échec. Aucune connaissance préalable n'est requise ; un niveau élevé d'ignorance est gage de bonne interprétation.

Un jouet cassé, éventré, trouvé comme tel aux rebuts. Brisé, il en émerge un agencement mécanique propice au montage. Les connecteurs Potentia, Insland et Ecosphère sont à récupérer en priorité. On peut les recycler facilement et dans des configurations très diverses. Très utiles pour leur capacité de captation de variables à basses fréquences, ils ont en outre l'aptitude à générer des dispositifs qui se confondent bien avec les sites où ils sont activés. Le montage est d'autant plus réussi qu'il parvient à imiter l'apparence et les fonctionnalités du joujou d'origine.

Un chemin, initiatique de préférence. Départ au point zéro, arrivée idem. Une succession de séquences à géométrie variable où l'acquisition de connaissances croît au contact des pèlerins rencontrés en route. Privilégier les équipements sporadiques et préférer le réemploi de matériaux collectés à proximité, s'alimenter des données en circulation. Attention aux leurres et autres mirages, notamment ceux à portées idéologiques, l'initiation est longue et ne souffre aucun engouement pour l'adhésion aux discours et postures non déconstruites. Une fois arrivé à destination, repartir.

Matériaux d'écriture

alotof_2013.pdf

Archipelagos : archipelagos.pdf

Projet Velosynth : http://luc.kerleo.free.fr/wikini/wakka.php?wiki=VeloMobile http://alotof.org/w/AlotofVelosynth

Projet (n)A et Caravan lab : https://wiki.dominiqueleroy.info/dokuwiki/doku.php?id=alotof-convergence

Entomosolar pour Posedy (evenement organisé par yoyo dans des cabanes de chasse) : https://dominiqueleroy.info/?p=203

Projet Island : http://alotof.org/w/Islands http://iles.laboratoiredeshypotheses.info/ ile_court.pdf

Projet Les abeilles (en cours d'écriture avec JEF) : http://du-libre.org/les-abeilles/doku.php

Liens utiles : http://alotof.org/w/ALOTOF-NANTES_ST_NAZAIRE_SUMMERCAMPS

Convergence du 20 au 26 Avril :

http://alotof.org/w/Nantes

Le guidelines de Guy Van Belle : http://alotof.org/w/OrganGuidelines

(il souhaite que l'on développe des idées sur la localisation des projets, le contexte, la notion du temps et le développement des projets le long de l'année (les saisons ?) et la question des ressources dans le développement des recherches/écologie des projets)

Voir aussi le texte d'Anais sur la question du module et texte de Marina sur ALOTOF (en cours)